Toujours suspendue à son arbre, complètement désespérée, Sayam voit arriver vers elle son funeste destin sous la forme de terroristes armés de poignards et de quelques pistolets. L’un d’entre eux s’approche d’un pas lourd et menaçant. Il est trempé de la tête au pied et a le nez en sang. Sayam le reconnaît, c’est celui à qui elle a filé un coup de pied et qu’elle a envoyé nager par deux fois dans le bassin.
(Terroriste) : Toi tu vas y goûter, sale garce !
Sayam gesticule autant qu’elle peut dans de vaines tentatives de défense par coups de pieds, sa position inconfortable rendant ses mouvements imprécis. Le terroriste place alors un gros coup de poing dans la hanche ensanglantée de la jeune femme, qui tombe quasiment inconsciente sous le coup de la douleur, non sans avoir poussé un cri de douleur et de désespoir. Elle remarque à peine le son provenant d’un moteur à fusion qui s’approche doucement. C’est un Piranha III, modifié pour le combat : un véhicule antigrav léger, normalement disposé au transport, mais qui peut également devenir une plate-forme d’armes mobile. Les terroristes se retournent vers la route à l’approche du véhicule.
(Terroriste) : C’est l’Ordo Arakis. Ils arrivent tard, on a déjà fait tout le sale boulot.
Les portes coulissantes de l’antigrav s’ouvrent pour laisser descendre trois personnages étranges. Le premier porte une combinaison cybernétique moulante destinée à la stimulation musculaire, ainsi qu’un masque excentrique qui couvre son visage. De longs dreadlocks retombent en une cascade noire depuis l’arrière de son crâne, illuminée ça et là par quelques perles de couleur et ornements dorés. Un étui à katana est accroché à sa ceinture. Le second arrivant est un homme d’un certain âge, aux cheveux noirs légèrement grisonnants. Son visage est dur et marqué par le temps et les batailles, plusieurs cicatrices déstructurant la symétrie de son faciès. Il porte des vêtements noirs recouverts par endroits de plaquettes d’acier. Un bandeau de la même couleur ceint son œil gauche, masquant sans doute les restes d’un organe perdu au moment où lui a été infligée la plus grosse cicatrice barrant son visage quasiment de haut en bas. L’individu a l’air très renfrogné. Le dernier membre du trio s’impose pour être le chef, par son allure et sa prestance. Il porte un long manteau noir aux bordures blanches couvant sa carrure tout en finesse et en longueur. Il a des cheveux assez longs, lui tombant jusqu’au milieu du dos, coiffés un peu n’importe comment, de couleur grise. Ses yeux brillent d’un bleu azur magnifique, et apparaissent si perçants qu’on pourrait croire leur porteur capable de voir au travers de la chair. Son visage à l’âge indéterminable laisse entrevoir les traits d’un grand meneur. Le chef des terroristes s’approche de lui, se pavanant avec fierté, bombant le torse.
(Terroriste) : Hey, vous voilà enfin : on a déjà tout liquidé. On peut pas dire que vous vous fouliez !
Le chef du trio se redresse légèrement, accordant un léger regard à son interlocuteur avant de détourner les yeux, une lueur de dégoût y apparaissant en surbrillance.
(L’homme) : Nous préférions voir d’autres personnes que nous impliquées dans ces meurtres.
Le terroriste affiche une mine surprise et saisit son interlocuteur au col, d’un geste brusque et insolent. L’autre reste imperturbable, le toisant finalement d’un regard détendu, aussi glacial que la mort.
(Terroriste) : Hey, Van Reinhardt ! Prenez garde à ce que vous dites. J’espère pour vous que c’est une plaisanterie !
Soudain, le bras par lequel le terroriste tenait le dénommé « Van Reinhardt » se détache du reste de son corps dans une fontaine de sang. L’homme se met à hurler, voyant l’individu à l’armure énergétique se redresser, tenant au bout du bras son katana couvert de sang. Il ne l’a même pas vu bouger, et il a pourtant eu le temps de dégainer son arme et de lui trancher le bras d’un geste plus rapide que le vent. Van Reinhardt n’a pas sourcillé, malgré le sang qui a giclé sur ses vêtements.
(Van Reinhardt) : Ce n’est en aucun cas une plaisanterie.
Les autres terroristes sortent leurs armes dans des mouvements paniqués, mais ils n’ont pas le temps de faire feu qu’ils sont déjà tous au sol, soit tranchés par le katana du premier homme de main de Van Reinhardt, soit abattus par l’auto-gun qu’a dégainé le second. Ce dernier range calmement son arme encore fumante dans l’étui destiné à la recevoir et s’avance vers les cadavres. L’un des terroristes est encore vivant et s’accroche à sa chaussure dans un geste de supplication désespéré. L’homme de main sort son auto-gun et tire une balle dans la tête de sa victime, l’achevant tout net sans autre forme de procès. Il se retourne vers son chef, qui n’a toujours pas bougé, complètement impassible face au carnage que ses hommes ont provoqué.
(Le borgne) : Rufus, que fait-on de cette femme accrochée à l’arbre ?
Rufus Van Reinhardt semble considérer un instant le corps inanimé de la jeune femme et hausse les épaules.
(Rufus) : Laissez-la où elle est. Il lui faudra du temps pour se remettre de ce qu’elle vient de vivre et elle ne risque pas de se détacher avant un moment. On ne risque rien à la laisser en vie.
Il se tourne vers la série de bâtiments qui sont juxtaposés juste à côté et les pointe rapidement du doigt.
(Rufus) : Ouvrez ces hangars et prenez tous les containers d’eau qui sont à l’intérieur. C’est pour ça qu’on est venu, non ?
Les deux hommes de main n’attendent pas une seconde de plus pour s’exécuter et se dirigent vers les hangars d’un pas rapide. Toujours suspendue à son arbre, Sayam rouvre lentement les yeux sur le charnier qui se trouve à ses pieds. À la vue de tous ces hommes tranchés en morceaux, baignant dans leur sang, elle a un haut-le-cœur. Ce mouvement de répulsion attire l’attention de Rufus. Le chef de l’Ordo Arakis se dirige vers elle et la saisit par les cheveux afin de lui soulever la tête et de voir son visage. Sayam a encore les yeux dans le vague, mais un air maladif se lit clairement sur ses traits pâles et tremblants.
(Rufus) : Tu es plus résistante que je ne le pensais, petite.
Il plisse les paupières, scrutant la jeune femme dans les moindres détails, semblant chercher à déterminer son identité.
(Rufus) : Ne serais-tu pas la fille de Laderton, que le vieil homme a gardé cachée pendant des années ?
Sayam retrouve alors un peu de force, et affichant le regard le plus affolé que Rufus ait jamais vu, à la limite de la bête sauvage acculée, elle se met à hurler comme une furie, son corps secoué par une crise de spasmes et de convulsions violente.
(Sayam) : DE L’EAU !!
Soudain, cette crise s’arrête, puis la tête de la jeune femme retombe inanimée vers l’avant, les yeux grand ouverts. Un filet de bave s’écoule lentement de sa bouche tandis que sa respiration faiblit. Elle est alors complètement inconsciente. Rufus se retourne calmement vers le borgne et l’interpelle.
(Rufus) : Cendar, ramène un baril d’eau par ici !
Le dénommé Cendar hoche la tête et fait rouler un baril d’eau jusqu’aux pieds de son chef avant de le redresser. Rufus monte sur le talus herbeux pour défaire les chaînes de Sayam entremêlées dans les branches. Une fois la manipulation achevée, la jeune femme s’effondre dans les bras de son « sauveur », toujours inanimée.
(Rufus) : Ouvre le couvercle.
De son œil unique, Cendar jette un regard incrédule à son chef.
(Cendar) : Quoi ?
(Rufus) : Fais ce que je te dis.
Sans ajouter le moindre mot, Cendar s’exécute et soulève le couvercle du baril, dévoilant l’élément aqueux qui s’agite mollement sous l’effet du choc. Toujours aussi calmement, Rufus introduit le corps meurtri de Sayam dans le baril, l’immergeant complètement. L’eau ne tarde pas à prendre une teinte rougeâtre en raison du sang qui s’échappe de la blessure de la jeune femme. Au bout d’un petit moment où rien ne semble être amené à se produire, Sayam rouvre les yeux et guette les deux personnages qui l’observent de la surface. Prudemment, elle extrait sa tête de l’eau.
(Cendar) : Qu’est-ce que c’est que cette gamine qui reste près de trois minutes sous l’eau, comme ça, sans respirer ?
Rufus reste un instant pensif, contemplant Sayam qui est retournée se réfugier sous la surface de l’eau, avant de finalement répondre à l’interrogation de son subordonné.
(Rufus) : Je n’en sais rien. Ou du moins, je n’en suis pas sûr. Va aider Raven à charger les derniers barils et faites chauffer le moteur. J’arrive.
Cendar s’éloigne d’un pas rapide pour rejoindre le dénommé Raven qui semble avoir observé toute la scène de loin.
(Raven) : Qu’est-ce qu’il fait avec cette gamine ?
(Cendar) : Je n’en sais rien, mais maintenant l’eau contenue dans ce baril est complètement foutue, vu tout le sang qui l’a souillée.
Alors que ses deux hommes de main finissent le travail, Rufus jette un coup d’œil à sa montre avant de porter un dernier regard sur Sayam qui n’a toujours pas ouvert la bouche. Finalement, il se détourne d’elle pour s’éloigner lentement vers son véhicule d’un air impassible. Cependant, une main froide et humide se saisit de son poignet. Rufus se retourne pour voir que Sayam lui tient fermement la main, d’un air suppliant.
(Rufus) : Tu n’as jamais été seule, n’est-ce pas ?
Timidement, enfonçant à moitié sa tête dans l’eau, Sayam la remue de droite à gauche pour répondre par la négative. Rufus pousse alors un léger soupir, sans toutefois changer d’expression. Cendar écarquille les yeux et frappe son collègue du coude pour attirer son attention en voyant son chef aider la jeune fille à s’extirper du baril d’eau. Une fois ceci fait, il revient vers eux avec Sayam accrochée à son bras, tremblante et ruisselante, à la manière d’un petit animal perdu. Alors que Rufus passe à côté d’eux, Raven interpelle son supérieur, sa voix obstruée par le masque qu’il porte en permanence.
(Raven) : Chef… on ne peut pas…
(Rufus) : Je connais parfaitement la situation de la famille Laderton. Cette gamine n’a rien à voir avec ça, et elle n’a plus personne au monde. On la prend avec nous.
Cendar s’apprête à son tour à émettre une objection, mais avant même qu’un son ne puisse sortir de sa bouche, Rufus le coupe brutalement.
(Rufus) : Le premier qui s’opposera à cette décision sera tué sur-le-champ de mes mains. Est-ce bien clair ?
La bouche de Cendar se referme alors, et aucun des deux hommes de main ne semble encore oser dire quoi que ce soit suite à cette mise en garde. Rufus monte à bord de l’antigrav et aide Sayam à s’y introduire, bientôt suivie dans ce mouvement par Cendar. Quant à Raven, il ouvre la portière latérale pour se mettre aux commandes et, sans un mot de plus, fait démarrer le véhicule qui reprend la route par laquelle il était venu, avec à son bord une vingtaine de barils d’eau, et une bien étrange jeune femme…
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