Dans la cour du manoir des Laderton, toute une équipe d’enquêteurs est sur le pied de guerre et cherche des indices susceptibles de faire avancer leur enquête. Aux côtés des cadavres du vieux Laderton et de son garde du corps, un magicien à la coupe de cheveux quelque peu extravagante est en train de faire ses inspections, griffonnant de manière nerveuse sur un petit calepin. De taille moyenne, les yeux fins et marrons, il porte le même uniforme que les membres de la Brigade Inquisitoriale d’Eidolon, à la différence qu’il apparaît nettement plus détendu : en effet, son blouson de cuir noir est à moitié ouvert, dévoilant son torse nu, et une longue écharpe rouge est enroulée autour de ses épaules. Soudain, un petit diablotin à la couleur de soufre surgit de derrière lui, un sourire machiavélique imprimé sur les lèvres. Son nez globuleux et proéminent est ce qui ressort le plus de son faciès grimaçant et moqueur. C’est un familier, un de ces êtres éthérés invoqués par les mages depuis une dimension parallèle afin de leur servir de serviteurs, d’aides, de catalyseurs… parfois d’amis. Le diablotin se place face à son maître qui tourne un œil dubitatif vers lui tout en soulevant paresseusement un sourcil.
(Diablotin) : Zerkim, ne fais pas comme si tu avais trouvé quelque chose !
(Zerkim) : Tais-toi, bordel, j’essaye de me concentrer. Tu pourrais te bouger un peu aussi !
Le diablotin se retourne vers les cadavres et écarte les bras comme s’il les révélait soudainement par ce geste.
(Diablotin) : C’est Louis Laderton, le propriétaire des lieux, et un de ses gardes du corps, Ulrich Vantrap. Tous les autres ont subi le même sort et les domestiques se sont terrés dans les caves au premier coup de feu. Ils n’ont rien vu.
(Zerkim) : Tu ne m’apprends pas grand-chose. Ils ont juste tué Laderton pour de l’eau ? Et puis pourquoi auraient-ils tué une partie de leurs complices devant les hangars ?
Le diablotin se retourne en se trifouillant la barbiche et colle un coup de pied dans le genou de son maître pour signifier sa mauvaise humeur.
(Diablotin) : Mais j’en sais rien moi ! Divergence d’opinions peut-être.
Le brigadier Zerkim jette un regard sombre à son familier, essayant de souligner la bêtise de ses précédentes paroles par ce geste.
(Zerkim) : Tu veux me faire croire qu’ils ne savaient pas à qui ils s’attaquaient ? Il faut être fou pour défier le clan Laderton… le contrecoup a dû être immédiat, la sentence sévère. Tous ces cadavres devant les hangars seraient une réponse ?
Le diablotin hausse les épaules, redressant son long index, comme pour souligner les faits.
(Diablotin) : Ça, c’est seulement des suspicions. Aux yeux de la loi, il s’agit simplement là de Lord Louis Laderton, point. En aucun cas le leader du clan portant son nom… soi-disant qu’il n’existe pas.
L’être éthéré jette un nouveau coup d’œil au cadavre du vieillard et affiche une grimace de circonstance.
(Diablotin) : En tout cas maintenant, il ne le sera plus jamais.
Zerkim se redresse en refermant son calepin et se met à arpenter la cour en se frottant le menton et en marmonnant, semblant être dans un état de réflexion avancé. Le diablotin se met à marcher dans ses pas, imitant la posture de son maître.
(Zerkim) : J’aurais pas dû accepter cette enquête, m’enfin bon... Donc on dispose de quoi, concrètement ?
(Diablotin) : Pff… de pas grand-chose : la baraque est protégée par magie, on peut rien analyser, aucun témoignage et aucune preuve.
Le duo descend la pente en direction des hangars et s’arrête devant l’hécatombe des terroristes faisant face aux espaces de stockage vidés de leur contenu.
(Zerkim) : Je vois mal comment on va pouvoir retrouver les vrais coupables. Le groupe armé responsable de la mort de Laderton a été complètement massacré, c’est donc qu’ils étaient manipulés par quelqu’un d’autre.
Zerkim se dirige vers le baril d’eau abandonné dans lequel Rufus avait plongé Sayam. Il jette un œil par-dessus pour contempler l’eau stagnante, toujours rouge du sang qui l’a souillée.
(Zerkim) : Et ce baquet nous a révélé quelque chose ?
Le diablotin claque ses mains l’une contre l’autre et affiche un air surpris.
(Diablotin) : Oui, oui : une fille a été plongée dedans. Les mages analystes disent que c’est la fille de Laderton.
(Zerkim) : Et où est allée Lady Laderton, selon toi ?
Le diablotin plaque ses deux index contre chacune de ses paupières closes et se concentre longuement, visualisant mentalement le baquet et essayant de voir au-delà du temps un indice susceptible de faire avancer l’enquête. Soudain, il a la vision de deux mains qui se rencontrent, l’une tirant l’autre hors du baril. Il rouvre alors les yeux.
(Diablotin) : Une main l’a tirée de là.
(Zerkim) : Une main humaine ?
(Diablotin) : Selon toute vraisemblance, mais je n’en vois pas plus. La sécurité magique de la propriété est trop forte. Elle interfère avec mes pouvoirs.
Zerkim recommence à faire les cent pas en grommelant, ne parvenant pas à trouver de solution aux questions que soulève cette affaire. Il a bien des suspicions sur certaines personnes, mais aucune preuve tangible. Il se retourne vers son familier qui le regarde se creuser la tête d’un air apathique, sans réagir.
(Zerkim) : Peut-être que Telziel et ses hommes pourraient nous filer un coup de main ?
(Diablotin) : La Brigade Inquisitoriale d’Eidolon ? Pourquoi pas, après tout… ils nous doivent bien un service, non ?
Au QG de la Brigade Inquisitoriale d’Eidolon, Telziel est profondément endormi sur son bureau, qui est un véritable fourbi. Gobelets en plastique parfois encore à moitié remplis de café noir, papiers empilés dans un pêle-mêle indescriptible, stylos, photos, antistress, console de jeu vidéo portable, un poste d’ordinateur enterré sous des dossiers : voici une petite sélection de ce qu’on peut trouver sur le bureau de cet inspecteur de la Brigade Inquisitoriale d’Eidolon. Soudain, la sonnerie du téléphone se met à retentir et Telziel s’éveille en sursaut, renversant un gobelet à moitié plein sur un dossier apparemment important.
(Telziel) : Et merde !
Il relève rapidement le gobelet, retire le dossier et l’agite rapidement pour enlever le plus gros du liquide qui s’est écoulé dessus. Une fois ceci fait, il le bazarde à nouveau sur le bureau, renversant une autre pile de feuilles qui s’écroule au sol dans une cascade de paperasse tonitruante. Étouffant un autre juron, l’inspecteur se met alors en quête du téléphone qui apparaît être enterré quelque part sous son tas de feuilles et le trouve finalement dans la poubelle. Il décroche rapidement, assis au sol, le visage encore endormi.
(Telziel) : Inspecteur Telziel, Brigade Inquisitoriale d’Eidolon, j’écoute ?
À l’autre bout du fil, on entend la voix de Zerkim.
(Zerkim) : Allo, Telziel ? C’est Zerkim, d’Adra’Haar. Je te dérange ?
(Telziel) : Non, non… Qu’est-ce que je peux pour toi ?
Dans la salle adjacente au bureau de Telziel, Notgiel est en train d’essayer de taper un rapport sur une machine à écrire visiblement récalcitrante. Eliza est assise au bureau d’en face et relit de la paperasse sur le sorcier Jenkins qu’ils ont appréhendé précédemment. Notgiel interpelle Eliza en lui lançant une boulette de papier.
(Eliza) : Mmmh ?
(Notgiel) : Heu… je me demandais si tu faisais quelque chose ce soir, après le service ?
Eliza sourit doucement en jetant la boulette de papier à la poubelle. Elle laisse mariner son collègue un instant, agissant comme si elle avait totalement éludé la question.
(Eliza) : Je ne sais pas si ça plairait à Maximilien…
Notgiel affiche une mine totalement paniquée qui fait sourire son interlocutrice.
(Notgiel) : Quoi ? Telziel ? Lui et toi, vous… ??
(Eliza) : Tu es inspecteur et tu n’avais même pas remarqué ça ?
Notgiel devient tout rouge et s’enfonce dans son fauteuil avant de recommencer à taper son rapport, visiblement très gêné par la situation. Soudain, la porte du bureau de Telziel s’ouvre à la volée, faisant sursauter le duo de brigadiers présents dans l’autre pièce. Telziel pointe une pile de dossiers du doigt.
(Telziel) : Notgiel, le dossier sur l’Ordo Arakis.
Notgiel, visiblement désireux de bien faire, se jette fébrilement sur la paperasse et commence à fouiller. Eliza se redresse de son bureau et lance un regard interrogateur à Telziel.
(Eliza) : Tu as du nouveau sur l’Ordo ?
(Telziel) : Zerkim de la Brigade d’Adra’Haar vient de m’appeler. Le Seigneur Louis Laderton a été tué par une petite organisation criminelle locale dont tous les membres ont été massacrés sur place. Bien sûr le butin qu’ils convoitaient a été volé par quelqu’un d’autre. Ça me semble typique des agissements de l’Ordo.
Notgiel extirpe un dossier assez énorme de la pile, faisant s’effondrer une bonne partie de celle-ci.
(Notgiel) : Je l’ai.
Il l’apporte à son bureau autour duquel viennent le rejoindre Telziel et Eliza.
(Notgiel) : On les avait repérés dernièrement entre Eidolon et Adra’Haar. Ils ont attaqué un autochenille, il me semble.
(Telziel) : Une proie bien trop inintéressante pour l’Ordo. On comprend maintenant pourquoi ils ont agi ainsi : ils y ont volé des armes qu’ils ont fournies aux terroristes qui ont tué Laderton. C’est comme ça qu’ils se sont greffés à l’affaire. Le reste n’est qu’une histoire de celui qui tirera le gros lot en premier. Ça ne peut jamais bien se finir, surtout avec l’Ordo Arakis.
Notgiel jette à l’inspecteur un regard en coin, dans lequel se lit un intérêt grandissant et une certaine curiosité.
(Notgiel) : Qui sont-ils en vérité ?
Devançant l’émoi farouche de Telziel face à l’ignorance de son subordonné, Eliza se racle la gorge pour attirer l’attention sur elle et prend calmement la parole.
(Eliza) : C’est un groupe de mercenaires qui ne dépend d'aucune instance politique connue et semble agir uniquement dans son propre intérêt. On ne compte plus le nombre de braquages, vols, assassinats, pillages, et j’en passe, qui leur sont attribués. Ça fait des années qu’on essaie de les coincer.
(Notgiel) : Mais vous êtes sûrs qu’ils sont liés à l’assassinat du Seigneur Laderton ?
(Telziel) : Non, mais presque. Notre but est justement de le prouver.
Telziel farfouille dans le dossier, en observe des feuillets pendant quelques minutes avant de tomber sur la photographie d’un hangar de ressourcement des eaux usées. Il brandit la photo vieillie par le temps devant ses collègues dans un geste triomphant.
(Eliza) : Qu’est-ce que c’est ?
(Telziel) : Soi-disant un hangar destiné au ressourcement et au nettoyage des eaux usées, mais en réalité un vrai petit marché noir de l’eau. L’Ordo semblait déjà avoir utilisé ces locaux pour le stock de certaines de ses marchandises, mais nous n’avons jamais pu le prouver.
(Notgiel) : Ça se trouve à Adra’Haar alors ?
(Telziel) : Non, à Hydrapole.
Notgiel affiche une moue légèrement surprise et hoche la tête de gauche à droite en signe de négation.
(Notgiel) : Ça n’a pas de sens ! Il n’y a aucun profit à tirer du marché de l’eau à Hydrapole.
Telziel se tape alors le front de la main, laissant clairement éclater son indignation sans qu’Eliza ait le temps de rattraper le coup cette fois.
(Telziel) : Mais t’es stupide ou quoi ? L’Ordo vole cette eau illégalement mais se doit de la revendre de manière légale. Ils ne veulent pas que les contrôleurs puissent se douter que l’eau contenue dans ces barils provient de chez Laderton, mais elle doit provenir de la source d’approvisionnement officielle d’Adra’Haar, qui se trouve chez leurs alliés du Kulshak, la province au Nord d’Hydrapole. C’est pour ça qu’ils vont les faire légaliser dans des zones de non-droit, précisément à Hydrapole, dans ce genre de hangars de stockage supposés acheminer les barils du Kulshak jusqu’à Adra’Haar. Là, ils les mêleront à d’autres barils officiels. Ça ne coûtera presque rien à l’Ordo. Une fois que les barils auront repassé la frontière, il n’y aura plus de risques de pistage, car même si les autorités locales prouvaient que ces barils étaient bien ceux de Laderton, ils n’auraient aucun droit dessus à cause de leur fausse provenance d’un territoire extérieur. C’est à ce moment que l’Ordo, disposant des titres de droit sur ces barils, les récupère et les revend à prix d’or, et ce de manière totalement légale, sans payer les coûts d’importation. Stratégie immonde mais payante.
Notgiel devient rouge de honte face à cette explication qui ne fait que démontrer son ignorance coupable des systèmes de fraudes courants entre les divers pays de Kiren. Eliza s’étire doucement en bâillant, tentant de ramener la conversation sur des rails à la fois plus efficaces et moins agressifs.
(Eliza) : Et donc on fait quoi maintenant ?
(Telziel) : Eh bien… en route pour Hydrapole !
(Diablotin) : Zerkim, ne fais pas comme si tu avais trouvé quelque chose !
(Zerkim) : Tais-toi, bordel, j’essaye de me concentrer. Tu pourrais te bouger un peu aussi !
Le diablotin se retourne vers les cadavres et écarte les bras comme s’il les révélait soudainement par ce geste.
(Diablotin) : C’est Louis Laderton, le propriétaire des lieux, et un de ses gardes du corps, Ulrich Vantrap. Tous les autres ont subi le même sort et les domestiques se sont terrés dans les caves au premier coup de feu. Ils n’ont rien vu.
(Zerkim) : Tu ne m’apprends pas grand-chose. Ils ont juste tué Laderton pour de l’eau ? Et puis pourquoi auraient-ils tué une partie de leurs complices devant les hangars ?
Le diablotin se retourne en se trifouillant la barbiche et colle un coup de pied dans le genou de son maître pour signifier sa mauvaise humeur.
(Diablotin) : Mais j’en sais rien moi ! Divergence d’opinions peut-être.
Le brigadier Zerkim jette un regard sombre à son familier, essayant de souligner la bêtise de ses précédentes paroles par ce geste.
(Zerkim) : Tu veux me faire croire qu’ils ne savaient pas à qui ils s’attaquaient ? Il faut être fou pour défier le clan Laderton… le contrecoup a dû être immédiat, la sentence sévère. Tous ces cadavres devant les hangars seraient une réponse ?
Le diablotin hausse les épaules, redressant son long index, comme pour souligner les faits.
(Diablotin) : Ça, c’est seulement des suspicions. Aux yeux de la loi, il s’agit simplement là de Lord Louis Laderton, point. En aucun cas le leader du clan portant son nom… soi-disant qu’il n’existe pas.
L’être éthéré jette un nouveau coup d’œil au cadavre du vieillard et affiche une grimace de circonstance.
(Diablotin) : En tout cas maintenant, il ne le sera plus jamais.
Zerkim se redresse en refermant son calepin et se met à arpenter la cour en se frottant le menton et en marmonnant, semblant être dans un état de réflexion avancé. Le diablotin se met à marcher dans ses pas, imitant la posture de son maître.
(Zerkim) : J’aurais pas dû accepter cette enquête, m’enfin bon... Donc on dispose de quoi, concrètement ?
(Diablotin) : Pff… de pas grand-chose : la baraque est protégée par magie, on peut rien analyser, aucun témoignage et aucune preuve.
Le duo descend la pente en direction des hangars et s’arrête devant l’hécatombe des terroristes faisant face aux espaces de stockage vidés de leur contenu.
(Zerkim) : Je vois mal comment on va pouvoir retrouver les vrais coupables. Le groupe armé responsable de la mort de Laderton a été complètement massacré, c’est donc qu’ils étaient manipulés par quelqu’un d’autre.
Zerkim se dirige vers le baril d’eau abandonné dans lequel Rufus avait plongé Sayam. Il jette un œil par-dessus pour contempler l’eau stagnante, toujours rouge du sang qui l’a souillée.
(Zerkim) : Et ce baquet nous a révélé quelque chose ?
Le diablotin claque ses mains l’une contre l’autre et affiche un air surpris.
(Diablotin) : Oui, oui : une fille a été plongée dedans. Les mages analystes disent que c’est la fille de Laderton.
(Zerkim) : Et où est allée Lady Laderton, selon toi ?
Le diablotin plaque ses deux index contre chacune de ses paupières closes et se concentre longuement, visualisant mentalement le baquet et essayant de voir au-delà du temps un indice susceptible de faire avancer l’enquête. Soudain, il a la vision de deux mains qui se rencontrent, l’une tirant l’autre hors du baril. Il rouvre alors les yeux.
(Diablotin) : Une main l’a tirée de là.
(Zerkim) : Une main humaine ?
(Diablotin) : Selon toute vraisemblance, mais je n’en vois pas plus. La sécurité magique de la propriété est trop forte. Elle interfère avec mes pouvoirs.
Zerkim recommence à faire les cent pas en grommelant, ne parvenant pas à trouver de solution aux questions que soulève cette affaire. Il a bien des suspicions sur certaines personnes, mais aucune preuve tangible. Il se retourne vers son familier qui le regarde se creuser la tête d’un air apathique, sans réagir.
(Zerkim) : Peut-être que Telziel et ses hommes pourraient nous filer un coup de main ?
(Diablotin) : La Brigade Inquisitoriale d’Eidolon ? Pourquoi pas, après tout… ils nous doivent bien un service, non ?
Au QG de la Brigade Inquisitoriale d’Eidolon, Telziel est profondément endormi sur son bureau, qui est un véritable fourbi. Gobelets en plastique parfois encore à moitié remplis de café noir, papiers empilés dans un pêle-mêle indescriptible, stylos, photos, antistress, console de jeu vidéo portable, un poste d’ordinateur enterré sous des dossiers : voici une petite sélection de ce qu’on peut trouver sur le bureau de cet inspecteur de la Brigade Inquisitoriale d’Eidolon. Soudain, la sonnerie du téléphone se met à retentir et Telziel s’éveille en sursaut, renversant un gobelet à moitié plein sur un dossier apparemment important.
(Telziel) : Et merde !
Il relève rapidement le gobelet, retire le dossier et l’agite rapidement pour enlever le plus gros du liquide qui s’est écoulé dessus. Une fois ceci fait, il le bazarde à nouveau sur le bureau, renversant une autre pile de feuilles qui s’écroule au sol dans une cascade de paperasse tonitruante. Étouffant un autre juron, l’inspecteur se met alors en quête du téléphone qui apparaît être enterré quelque part sous son tas de feuilles et le trouve finalement dans la poubelle. Il décroche rapidement, assis au sol, le visage encore endormi.
(Telziel) : Inspecteur Telziel, Brigade Inquisitoriale d’Eidolon, j’écoute ?
À l’autre bout du fil, on entend la voix de Zerkim.
(Zerkim) : Allo, Telziel ? C’est Zerkim, d’Adra’Haar. Je te dérange ?
(Telziel) : Non, non… Qu’est-ce que je peux pour toi ?
Dans la salle adjacente au bureau de Telziel, Notgiel est en train d’essayer de taper un rapport sur une machine à écrire visiblement récalcitrante. Eliza est assise au bureau d’en face et relit de la paperasse sur le sorcier Jenkins qu’ils ont appréhendé précédemment. Notgiel interpelle Eliza en lui lançant une boulette de papier.
(Eliza) : Mmmh ?
(Notgiel) : Heu… je me demandais si tu faisais quelque chose ce soir, après le service ?
Eliza sourit doucement en jetant la boulette de papier à la poubelle. Elle laisse mariner son collègue un instant, agissant comme si elle avait totalement éludé la question.
(Eliza) : Je ne sais pas si ça plairait à Maximilien…
Notgiel affiche une mine totalement paniquée qui fait sourire son interlocutrice.
(Notgiel) : Quoi ? Telziel ? Lui et toi, vous… ??
(Eliza) : Tu es inspecteur et tu n’avais même pas remarqué ça ?
Notgiel devient tout rouge et s’enfonce dans son fauteuil avant de recommencer à taper son rapport, visiblement très gêné par la situation. Soudain, la porte du bureau de Telziel s’ouvre à la volée, faisant sursauter le duo de brigadiers présents dans l’autre pièce. Telziel pointe une pile de dossiers du doigt.
(Telziel) : Notgiel, le dossier sur l’Ordo Arakis.
Notgiel, visiblement désireux de bien faire, se jette fébrilement sur la paperasse et commence à fouiller. Eliza se redresse de son bureau et lance un regard interrogateur à Telziel.
(Eliza) : Tu as du nouveau sur l’Ordo ?
(Telziel) : Zerkim de la Brigade d’Adra’Haar vient de m’appeler. Le Seigneur Louis Laderton a été tué par une petite organisation criminelle locale dont tous les membres ont été massacrés sur place. Bien sûr le butin qu’ils convoitaient a été volé par quelqu’un d’autre. Ça me semble typique des agissements de l’Ordo.
Notgiel extirpe un dossier assez énorme de la pile, faisant s’effondrer une bonne partie de celle-ci.
(Notgiel) : Je l’ai.
Il l’apporte à son bureau autour duquel viennent le rejoindre Telziel et Eliza.
(Notgiel) : On les avait repérés dernièrement entre Eidolon et Adra’Haar. Ils ont attaqué un autochenille, il me semble.
(Telziel) : Une proie bien trop inintéressante pour l’Ordo. On comprend maintenant pourquoi ils ont agi ainsi : ils y ont volé des armes qu’ils ont fournies aux terroristes qui ont tué Laderton. C’est comme ça qu’ils se sont greffés à l’affaire. Le reste n’est qu’une histoire de celui qui tirera le gros lot en premier. Ça ne peut jamais bien se finir, surtout avec l’Ordo Arakis.
Notgiel jette à l’inspecteur un regard en coin, dans lequel se lit un intérêt grandissant et une certaine curiosité.
(Notgiel) : Qui sont-ils en vérité ?
Devançant l’émoi farouche de Telziel face à l’ignorance de son subordonné, Eliza se racle la gorge pour attirer l’attention sur elle et prend calmement la parole.
(Eliza) : C’est un groupe de mercenaires qui ne dépend d'aucune instance politique connue et semble agir uniquement dans son propre intérêt. On ne compte plus le nombre de braquages, vols, assassinats, pillages, et j’en passe, qui leur sont attribués. Ça fait des années qu’on essaie de les coincer.
(Notgiel) : Mais vous êtes sûrs qu’ils sont liés à l’assassinat du Seigneur Laderton ?
(Telziel) : Non, mais presque. Notre but est justement de le prouver.
Telziel farfouille dans le dossier, en observe des feuillets pendant quelques minutes avant de tomber sur la photographie d’un hangar de ressourcement des eaux usées. Il brandit la photo vieillie par le temps devant ses collègues dans un geste triomphant.
(Eliza) : Qu’est-ce que c’est ?
(Telziel) : Soi-disant un hangar destiné au ressourcement et au nettoyage des eaux usées, mais en réalité un vrai petit marché noir de l’eau. L’Ordo semblait déjà avoir utilisé ces locaux pour le stock de certaines de ses marchandises, mais nous n’avons jamais pu le prouver.
(Notgiel) : Ça se trouve à Adra’Haar alors ?
(Telziel) : Non, à Hydrapole.
Notgiel affiche une moue légèrement surprise et hoche la tête de gauche à droite en signe de négation.
(Notgiel) : Ça n’a pas de sens ! Il n’y a aucun profit à tirer du marché de l’eau à Hydrapole.
Telziel se tape alors le front de la main, laissant clairement éclater son indignation sans qu’Eliza ait le temps de rattraper le coup cette fois.
(Telziel) : Mais t’es stupide ou quoi ? L’Ordo vole cette eau illégalement mais se doit de la revendre de manière légale. Ils ne veulent pas que les contrôleurs puissent se douter que l’eau contenue dans ces barils provient de chez Laderton, mais elle doit provenir de la source d’approvisionnement officielle d’Adra’Haar, qui se trouve chez leurs alliés du Kulshak, la province au Nord d’Hydrapole. C’est pour ça qu’ils vont les faire légaliser dans des zones de non-droit, précisément à Hydrapole, dans ce genre de hangars de stockage supposés acheminer les barils du Kulshak jusqu’à Adra’Haar. Là, ils les mêleront à d’autres barils officiels. Ça ne coûtera presque rien à l’Ordo. Une fois que les barils auront repassé la frontière, il n’y aura plus de risques de pistage, car même si les autorités locales prouvaient que ces barils étaient bien ceux de Laderton, ils n’auraient aucun droit dessus à cause de leur fausse provenance d’un territoire extérieur. C’est à ce moment que l’Ordo, disposant des titres de droit sur ces barils, les récupère et les revend à prix d’or, et ce de manière totalement légale, sans payer les coûts d’importation. Stratégie immonde mais payante.
Notgiel devient rouge de honte face à cette explication qui ne fait que démontrer son ignorance coupable des systèmes de fraudes courants entre les divers pays de Kiren. Eliza s’étire doucement en bâillant, tentant de ramener la conversation sur des rails à la fois plus efficaces et moins agressifs.
(Eliza) : Et donc on fait quoi maintenant ?
(Telziel) : Eh bien… en route pour Hydrapole !
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